Utopie : Itinéraires d’un vocable

Peu de termes sont aussi surchargés, par des interprétations divergentes et des évaluations contradictoires, que le vocable d’utopie [1]. L’effet de saturation qui en résulte défie, semble-t-il, tout effort de clarification. Il est pourtant possible de dégager les lignes de force autour desquelles s’organise l’évolution du terme et se distribuent ses emplois, alors que, simultanément, se multiplient et se diversifient les approches de l’utopie elles-mêmes. Encore que parler d’approches en la matière relève d’une tentative rituelle d’euphémisation des conflits théoriques : derrière les débats académiques sur les critères et les frontières de l’utopie se profilent des combats idéologiques et politiques déterminés.

Sans qu’il soit nécessaire de revenir sur la signification d’Utopie dans l’ouvrage de Thomas More, un rapide relevé des significations attachées au vocable peut permettre d’établir le contexte dans lequel intervient la critique du socialisme et du communisme utopiques par Marx et Engels.

Premiers contours

L’histoire de la notion d’utopie est marquée, d’emblée, par une ambiguïté fonda-mentale, puisque, simultanément, cette notion désigne un genre de discours et évalue la démarche et les propositions qui lui appartiennent. Désignations théoriques et assignations polémiques échangent en permanence leurs effets de sens. Comme le note Bronislaw .Baczko, « ...l’utopie n’est nullement un concept neutre mais au contraire fortement valorisé et valorisant » [2]. Il n’en demeure pas moins que l’on peut tenter de distinguer des usages descriptifs (voire théoriques) et des usages normatifs (voire polémiques)

Dans son usage descriptif, la notion d’utopie désigne un genre de discours bâti sur le modèle de l’Utopie de Thomas More. Or ce modèle est double puisqu’il se propose à la fois comme un modèle narratif que comme un modèle normatif : comme une fiction indexée sur l’imaginaire et comme une figuration indexé sur l’idéal. Aussi la notion d’utopie désigne conjointement ou alternativement un genre littéraire (que la critique contribue à constituer comme genre, autant qu’à le décrire, en suivant ses transformations à partir du récit de Thomas More et des récits des voyages imaginaires) et un genre philosophique (dont la critique reconstitue les origines et fixe les frontières, en remontant à La République de Platon et en parcourant tous les modèles de sociétés idéales). Les figurations indexées sur l’idéal se partagent à leur tour entre celles qui recourent à un modèle législatif (Platon) et celles qui empruntent un procédé descriptif : celui du genre littéraire proprement dit [3].

Cette dualité d’usages se reflète, dès le XVIIème siècle, dans les définitions et les classements. Des dictionnaires enregistrent le caractère imaginaire voire romanesque des utopies en soulignant qu’elles décrivent des pays qui n’existent nulle part. Mais en même temps ils tendent à retenir le caractère idéal voire philosophique de l’utopie, en la défi-nissant comme « plan d’un gouvernement imaginaire, à l’exemple de la République de Platon » [4]. Genre philosophique ou genre littéraire ? Alors que les Encyclopédies abordent les utopies comme genre théorique et philosophique, la collection éditée par Charles-Georges-Thomas Garnier (1787-89) traite les utopies comme variétés d’un genre littéraire et romanesque, ainsi qu’en témoigne son titre : « Voyages imaginaires, romanesques, merveilleux, allégoriques, amusants, comiques et critiques ; suivis des songes, des visions et des romans cabalistiques » [5].

Ainsi, dès le 18e siècle, l’histoire de la notion d’utopie permet d’observer comment le genre tend à se constituer, non tant sous l’effet d’une génération spontanée d’œuvres qui reconnaîtraient leur intention et leur destination communes, que sous l’effet des commentaires qui façonnent le genre autant qu’ils le découvrent [6].

Dans ses usages normatifs (voire polémiques), la notion d’utopie qualifie, pour les juger, les propositions socio-politiques (et, plus largement, des projets de toute nature ) : usages ambivalents, même si les valorisations négatives, qui dénoncent les propositions chimériques, l’emportent généralement sur les valorisations positives, qui consacrent les idées régulatrices.

Le crédit porté aux utopies tend à se fonder sur leur valeur philosophique. À l’inverse, le dis-crédit jeté sur elles tire argument de leur teneur littéraire. Toutefois, la distribution des évaluations de l’utopie n’épouse pas strictement le partage entre les romans et les modèles. Ainsi, considérée comme genre littéraire, l’utopie tombe sous le coup des critiques des romans eux-mêmes : utilité ou futilité, éducation ou évasion ? De même, reconnue comme genre philosophique, l’utopie tombe sous le coup de la critique des constructions de la Raison : possibilité ou impossibilité, éveil ou rêve, idéal ou chimère ?

La notion d’utopie déborde alors les limites du genre utopique proprement dit pour qualifier, selon son ambivalence native, tout idéal non réalisé ou tout idéal non réalisable. Où l’on voit que sous le terme d’utopie se joue en général le partage du possible et de l’impossible qui n’est pas tant l’objet d’un débat que d’un combat qui déplace en permanence les limites du genre et modifie sans cesse la liste des œuvres qui, pour la honte ou pour la gloire de leurs auteurs, y prennent place : pour qualifier, alternativement, ou bien la part d’irréalité ou d’impossibilité que comporte ce que les hommes désignent comme possible et idéal, ou bien la part de réel ou de possible que comprend ce que les hommes déclarent impossible, pour reprendre une formule de Victor Hugo : « La grandeur de la Convention fut de chercher la quantité de réel qui est dans ce que les hommes appellent l’impossible [7]. »

Ces jugements croisés ou contradictoires peuvent être illustrés par l’exemple des commentaires de l’œuvre de Rousseau  : ils permettent de parcourir les principales couleurs du prisme. Rousseau, selon lui, n’a pas écrit une utopie car l’utopie n’est que chimère. Selon Jacques Pierre Brissot, Rousseau a écrit une utopie qui n’est plus chimère. Selon Kant, Rousseau a écrit une utopie, mais l’utopie n’est pas chimère. L’œuvre de Rousseau illustre donc le paradoxe des classements impossibles.

Il peut être utile de préciser. Rousseau, en effet, récuse l’utopie ; il s’emploie à distinguer son propre modèle théorique des modèles utopiques qu’il qualifie de chimériques. Ainsi, il écrit à Mirabeau père : « Votre système est très bon pour les gens de l’utopie, il ne vaut rien pour les enfants d’Adam [8]. » Et il se défend d’avoir, avec Le Contrat social, conçu une utopie digne d’être reléguée « avec la république de Platon, les Sévarambes et l’Utopie, dans le pays des chimères » [9]. Or Jacques Pierre Brissot, en admirateur de Rousseau, s’emploie à dissoudre l’identification entre utopie et chimère dans une formule remarquable. Il écrit, en effet, parlant de Bernardin de Saint Pierre qu’il compare à Rousseau : « Il n’appartient pas à ce monde, il est de celui de Rousseau. Vous avez à peine lu quelques pages, que vous croyez transportés dans un pays où l’utopie n’est plus chimère [10]. » Au-delà de ce point de passage, le sens de la notion bascule. C’est avec Kant que l’on peut achever, provisoirement, ce parcours symbolique. Kant, prenant pour référence La République de Platon, défend l’utopie, sans mentionner le terme, contre ceux qui la condamnent comme irréalisable : « Une constitution ayant pour but la plus grande liberté humaine fondée sur des lois qui permettraient à la liberté de chacun de subsister en même temps que la liberté des autres (...) c’est là au moins une idée nécessaire qui doit servir de base non seulement aux grandes lignes d’une constitution civile, mais encore à toutes les lois (...) » [11]. Ainsi Kant prête à Platon un idéal inspiré des Lumières... et de Rousseau.

Après la Révolution de 1789, l’usage polémique prend le pas sur l’usage théorique. Inflation et prolifération : ce sont les versions les plus générales qui se répandent et l’emploi dépréciatif qui domine : l’utopie devient le label de l’irréalisme et de l’irréalisable, qui permet de disqualifier tout projet de réforme politique et sociale auquel on s’oppose. Au point d’absorber les usages analytiques dont la vocation était de délimiter un genre littéraire et/ou philosophique déterminé : l’obstruction polémique supplante la construction théorique. Chaque camp l’utilise contre un camp plus radical : Royalistes contre Républicains, conservateurs contre libéraux.

Et, tous ensembles, contre les socialistes.

Critiques des socialismes

Au cours du 19ème siècle, en effet, l’usage général de la notion d’utopie se double rapidement d’un usage spécial qui la focalise sur les socialismes pour les discréditer. Cet usage n’est, dans un premier temps, que l’application de son usage général, pris dans sa version polémique la plus négative : « Les socialismes sont des utopies ».

Cette focalisation joue sur toutes les nuances de la dépréciation, de la commisération pour un idéal stérile à la condamnation de ses effets néfastes. En Allemagne, cette critique de l’utopie des socialismes n’appartient pas seulement aux forces les plus réactionnaires : elle est partagée par des forces conservatrices, mais aussi par des forces libérales. Au mieux, on reconnaîtra aux socialistes d’avoir soulevé des questions sociales qu’ils auraient mal résolues. Le cas échéant, une telle critique se prévaut de la critique hégélienne du « devoir-être » qui lui confère ses lettres de noblesse. En France, la critique de l’utopie des socialismes devient le lieu commun des divers courants libéraux qui répliquent à l’opposition du socialisme à l’individualisme par l’opposition de la liberté à la dictature. Benjamin Constant et Alexis de Tocqueville déposent en ce sens et tracent l’emplacement où la notion d’utopie vient se loger [12].

Mais, pour que l’équivalence soit complète, la focalisation sur les socialismes d’une condamnation générale de l’utopie ne suffit pas. Il faut encore montrer que l’utopie est l’essence même du socialisme parce que le socialisme est l’essence même de l’utopie : « L’utopie, c’est le socialisme ».

Reconstruit sous l’emprise de la polémique, l’usage analytique permet de cerner de nouveau le genre utopique lui-même, en procédant à l’intégration des formes modernes du socialisme et du communisme au genre utopique ainsi redéfini : les socialismes modernes ne sont que des variétés d’un genre utopique et la vérité même de ce genre. Il n’est pas superflu de le souligner : ce sont les commentateurs qui procèdent à cette redéfinition et non les auteurs et les œuvres concernés. Contrairement à ce qu’une pesante tradition laisse entendre, le classement de Saint-Simon, Owen et Fourier n’est pas une production naturelle : comme si les écrits utopiques avaient rejoint spontanément le genre utopique, à la façon dont les corps chez Aristote se destinent à leur lieu naturel. Il s’agissait, au contraire, du ré-ultat d’opérations théoriques et politiques précises : le classement des socialismes et communismes comme variétés dernières et vérités ultimes du genre utopique est un produit de la critique libérale et appartient à son horizon théorique et politique. L’œuvre de Louis Reybaud est là pour en témoigner. C’est elle en effet qui, dès 1840 entreprend d’établir les « origines et filiations des utopies sociales » avant d’examiner les « théories contemporaines » dont la critique s’amplifie et se radicalise au fil des rééditions [13].

Cette critique, à la fois englobante et détaillée est relancée par la révolution de 1948 qui trouve un écho dans un ouvrage d’Alfred Sudre qui achève de classer le socialisme et le communisme dans une éternelle utopie : Histoire du communisme, ou Réfutation ses utopies socialistes. Du « communisme de Lacédémone et de la Crète »(Chapitre II) à celui de « M. Proudhon » (chapitre XVIII), un même communisme et une même utopie, en dépit de leur variantes [14].

Face à cette charge, les représentants du socialisme et du communisme répliquent par une défense en ordre dispersé mais qui se résume en une double opération de disculpation et de duplication.

Contre les usages polémiques libéraux et conservateurs, les tentatives de disculper le socialisme et le communisme de l’accusation d’être utopiques, retiennent les qualificatifs dévalorisants associés à l’utopie pour révéler et disqualifier, comme défense de l’ordre social existant, le point de vue de la critique adverse. Cette critique est celle du « parti des routiniers » que dénonce Babeuf, avant même que ce « parti » ne s’approprie le vocable d’utopie : « Le parti des routiniers, qui croit que ce qui est a toujours été et doit toujours être, traitent de chimérique et d’extravagant, tout ce qui sort de la ligne de ses habitudes [15]. » La critique qui disqualifie l’utopie est celle des rois et des aristocrates, adversaires de toute nouveauté, que dénonce Cabet : « (...) on dit sans cesse une Utopie pour dire une perfection nouvelle et imaginaire ; car les rois et les aristocrates reconnaissent bien que l’innovation de l’Utopie serait une perfection, mais ils soutiennent et répètent qu’elle est impraticable comme celle de Platon [16]. » C’est la critique des esprits prévenus d’avance contre toute nouveauté que dénonce l’héritier présomptif de Fourier, Victor Considérant : ces esprits qui « (...) disent que vous êtes des insensés, des utopistes, des "têtes sans cervelle", c’est leur mot." ; (...) croient avoir écrasé une idée par les mots "utopie", "impossible", "rêve" ou chimère" ». Ceux qui après avoir « fait grimacer votre conception » et l’avoir « défigurée et faite à leur image, (...) vous disent avec un air de satisfaction : "Votre théorie est une utopie bizarre et vulnérable !" [17]. »

Mais, cette tentative de retourner la charge de la preuve, en sommant les conservateurs de se disculper à leur tour et de rendre des comptes, ne dispense pas les socialistes et les communistes de répondre de leurs éventuelles chimères. Apparaît alors une seconde ligne de défense, qui consiste à détourner l’accusation générale sur des formes particulières du socialisme et du communisme. Dès lors, deux approches tendent à se distinguer. Dans l’optique de la critique conservatrice, il s’agit de diagnostiquer pour les combattre les formes socialistes de l’utopie : l’éternelle utopie. Dans l’optique de la critique socialiste, il s’agit de distinguer pour en débattre, les formes utopiques du socialisme : l’indispensable socialisme. Mais les critiques socialistes de l’utopie se bornent en général à reproduire les déterminations de la critique conservatrice en limitant son étendue. Il s’agit alors d’une simple duplication de la critique adverse, qui en accepte la méthode et les présupposés.

Ainsi, une fois l’adversaire disqualifié, on reproduit sa critique. En Allemagne, les courants attirés par le socialisme reproduisent la critique libérale inspirée de Hegel, puis de Lorenz von Stein [18], pour instaurer une ligne de partage entre la philosophie allemande et le socialisme français ou anglais, puis entre les « Socialistes vrais » et les autres. C’est dans ce cadre que les critiques françaises de l’utopie sont mises à contribution et traduites en Allemand. En France, la polémique autour du concept d’utopie est investie d’abord par les courants humanitaires et chrétiens (Pierre Leroux, Philippe Buchez), puis par Pierre-Joseph Proudhon. À l’exception notable de Blanqui [19], c’est au concept libéral de l’utopie qu’ils sont redevables de l’usage distinctif qu’il s’efforce d’en faire. La duplication de la critique libérale commence par la duplication de son contenu avant de s’achever dans la duplication de son concept.
On pourrait suivre ainsi l’itinéraire de Pierre Leroux qui a consacré le terme de socialisme, en opposant l’individualisme et le socialisme pour rechercher une synthèse qui lui permet de récuser l’utopie comme telle. « La famille, la patrie, la propriété, sont les trois modes nécessaires de la communion de l’homme avec ses semblables et avec la nature », écrit-il, avant de trancher : « ...sauf les solitaires de la Thébaïde, jamais utopiste, jamais rêveur n’a poussé l’absurdité jusqu’à vouloir abolir à la fois ces trois modes de communion de l’homme avec ses semblables et avec la nature. Les sectaires et les utopistes se sont retranchés à essayer de détruire un ou deux de ces trois modes nécessaires au profit du troisième ». Alors que Leroux, au contraire, propose de mieux les organiser [20].

On pourrait de même l’itinéraire de Pierre-Joseph Proudhon qui dans Qu’est-ce que la propriété commence par renvoyer dos à dos fouriéristes et saint-simoniens d’une part et babouvistes et néo babouvistes d’autre part et critiquer les partisans de la communauté au nom de l’égalité certes mais surtout de la liberté, avant de les dénoncer comme utopistes dans Philosophie de la Misère [21].

Ainsi, et de façon générale, l’usage socialiste du vocable d’utopie procède essentiellement d’un détournement de l’usage libéral, sans engager la construction d’une problématique nouvelle. L’usage spécial (et spécifique) vient doubler l’usage général (et générique) sans en changer le sens : éternelle utopie, dont chaque version répète une histoire identique et qui reste vouée à une histoire immobile, faute d’avoir une histoire.

C’est en fonction de cet ensemble complexe et diversifié, où les significations flottantes d’un terme omniprésent servent des positions théoriques et politiques divergentes, que l’on peut situer l’intervention de Marx donne à la critique des socialismes et des communisme utopiques une signification particulière [22].

Notes

[1Les notes qui suivent sont une version à peine modifiée de quelques pages de Congédier l’utopie ? L’utopie selon Karl Marx, L’Harmatan, 286 pages, 1994, pp.23-32.

[2Bronislaw Bacsko, Lumières de l’utopie, Critique de la Politique/Payot, 1978, p.19.

[3Sur cette dualité des modèles de discours utopique, voir également Bronislaw Bacsko, op.cit., p.20.

[4Dictionnaire de Trévoux, 6e édition, 1771.

[536 vol., in-8, conservés à Lyon, BM de la Part Dieu, 300810 et SJ G 221/01 à 39. Cette collection a fait l’objet en 2015 d’un mémoire de Master de Sarah Nègre, disponible en .pdf.

[6Sur les frontières de l’utopie (et tout ce qui précède) : Bronislaw Bacsko, op.cit., pp. 13-64 et Georges Benrekassa, Le concentrique et l’excentrique : Marges des Lumières, Payot, 1980, notamment les études suivantes : Utopies des Lumières (pp. 91-123) et Le savoir de la fable et l’utopie du savoir : textes utopiques et recueil politiques -1764-1788 - (pp. 125-153).

[7Victor Hugo, Quatre-vingt-treize, édition de poche Folio, Gallimard, 1977, p. 209.

[8Jean-Jacques Rousseau, Lettre du 26 Juillet 1767, in Lettres Philosophiques, Jean-Jacques Rousseau : Lettres philosophiques. Présentées par Henri Gouhier, Paris, Vrin, 1974, 232 p.

[9Jean-Jacques Rousseau, Lettres de la Montagne, Pléiade, t.3.p.810.

[10Jacques Pierre Brissot, Mémoires (1754-1793) Paris, 1912, t.2 p.275.

[11Emmanuel Kant, Critique de la Raison pure, Bibliothèque de Philosophie contemporaine, P.U.F., 3ème éd. p. 264.

[12Benjamin Constant, « De M.Dunoyer et de quelques-uns de ses ouvrages », article paru dans la Revue encyclopédique, en février 1826 (t.29), reproduit dans les textes choisis, présentés et annotés par Marcel Gauchet, publiés sous le titre : De la liberté chez les modernes, Collection Pluriel/Le livre de poche, 1980. Dès 1826, en prenant les conceptions de Rousseau et de Mably pour objets, Benjamin Constant jette les bases de la critique du despotisme, qui sera ultérieurement étendue à ses contemporains. Parallèlement, c’est contre le dogmatisme sous toutes ses formes que la revue Le Globe mène le combat. Certains libéraux, pourtant cédèrent quelques temps à la tentation dogmatique, comme le montre l’exemple de la Revue encyclopédique. C’est dans cette revue pourtant que Benjamin Constant sonne la charge, en prenant pour cible les saint-simoniens, bientôt suivi par Dunoyer, et les républicains. Voir, notamment, Paul Bénichou, Le Temps des Prophètes, Gallimard, 1977, p. 34 et pp. 43-52.

[13Louis Reybaud, Etudes sur les Réformateurs ou socialistes modernes, Paris, Guillaumin, 1ère éd.:1840, 2ème éd.:1841, 3ème éd.(2 vol.):1842-1843.

[14Alfred Sudre, Histoire du communisme, ou Réfutation ses utopies socialistes Paris, Victor Lecou éditeur, 1848. Réimpression Hachette livre et BNF.

[15Gracchus Babeuf, Le Tribun du Peuple, (1794-1796), 10/18, pp.234-235.

[16Étienne Cabet, Voyage en Icarie (1840), éditions Anthropos, 1970, pp.480-481.

[17Victor Considérant, Destinées sociales, Paris, au bureau de la Phalange, 1834-1844, 3 vol. Extraits in Gian Mario Bravo, Les socialistes avant Marx, t.1 pp.204-226. Nos citations sont tirées des pp.206-209.

[18Lorenz von Stein, Der Socialismus und Communismus des heutigen Franchreich. Ein Beitrag zur Zeitgeschschte, Leipzig, 1842.

[19Auguste Blanqui, Le communisme, avenir de la société (1870) Le Passager Clandestin, mars 2008.

[20Pierre Leroux, De l’Humanité (1840), Fayard, 1985, p.138.

[21Pierre-Joseph Proudhon, Qu’est-ce que la Propriété ?, Garnier-Flammarion, respectivement p.159, 165, et p.279 sq.

[22Dont l’exposé et l’examen critique sont l’objet de la première partie de la thèse que j’ai soutenue en 1992 et qui a fait l’objet d’une publication séparée sous le titre Congédier l’utopie ? L’utopie selon Karl Marx, L’Harmattan, 286 pages, 1994.

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