Marx et l’appropriation sociale (1) : Enjeux et modalités

La perspective de l’abolition de la propriété privée des moyens de production et d’échange (auxquels il convient d’ajouter les moyens de communication) est la pierre de touche qui permet de distinguer, aujourd’hui plus que jamais, le socialisme et le communisme de tous les avatars qui parfois en gardent encore les noms [1]. Mais la perspective de cette abolition qui, dans sa forme positive, implique l’appropriation sociale de ces mêmes moyens par les producteurs-citoyens est aussi le trajet où se sont égarés tous les projets d’émancipation depuis plus de 150 ans. Jusqu’à leur inversion monstrueuse par la contre-révolution stalinienne : l’appropriation étatique des moyens de production et d’échange, au lieu d’ouvrir une voie de passage vers l’appropriation sociale, devient alors l’un des instruments majeurs d’une exploitation sans frein et d’une domination politique sans partage, dont le Goulag est à la fois le symbole et l’accomplissement.

La conception de Marx n’est pas sortie indemne de ce retournement désastreux. Rendue solidaire des effets qu’on lui impute, elle est devenue la proie de tous les contresens intéressés. Pourtant, même si l’expérience historique ne diffuse pas par elle-même une lumière suffisante, elle invite à explorer les recoins d’une œuvre indéfiniment ouverte à celles et ceux qui n’ont pas renoncé à la perspective de l’émancipation sociale. Non pour retrouver la fraîcheur des commencements ou pour se plonger dans une eau lustrale, mais pour l’interpeller à partir de problèmes qui se posent à nous.

Cette contribution pourtant, parce qu’elle se tient dans les limites des textes de Marx et d’Engels, assume tous les risques d’un commentaire qui ne fait place que par allusion aux élaborations théoriques ultérieures ainsi qu’aux leçons théoriques que l’on pourrait extraire de l’histoire ou, plutôt, d’une réflexion sur l’histoire. Mais, pour inscrire la perspective de l’appropriation sociale dans une analyse contemporaine de la dynamique du capitalisme et réévaluer ce qui la rend souhaitable et réalisable, il n’est pas inutile de sonder les fondations.

I. Perspectives et enjeux

Pour doter cette contribution d’un commencement qui permette de prendre d’emblée la mesure de la place que Marx accorde à la perspective de l’appropriation sociale, c’est au moment où il se déclare ouvertement communiste, que l’on peut se référer.

1. Des perfections imaginaires ?

En 1846, dans L’ Idéologie Allemande, comme dans nombre de textes antérieurs, Marx trace la perspective d’une émancipation totale [2]. Dans la mesure où l’aliénation est complète (elle affecte la totalité des aspects de l’existence humaine), universelle (elle concerne la totalité des êtres humains), intégrale (elle mutile la totalité des manifestations de la vie individuelle), elle exige une émancipation complète, universelle et intégrale.

(1) L’émancipation, tout d’abord, doit être universelle, puisqu’elle concerne la totalité des forces productives et des individus qui se les approprient. Le développement des forces productives, soutient Marx, a engendré le comble de l’aliénation et l’a rendue insupportable, au point que les « individus de l’époque actuelle sont contraints d’abolir la propriété privée » [3] par une appropriation des forces productives qui ne peut être qu’universelle : « les individus sont obligés de s’approprier la totalité des forces productives existantes non seulement pour parvenir à manifester leur moi mais avant tout pour assurer leur existence » [4].

Le même texte envisage cette appropriation sous toutes ses faces.

- Dans la mesure où cette appropriation est déterminée par son objet, c’est une appropriation de forces productives universelles : « Cette appropriation est conditionnée, en premier lieu, par l’objet qu’il s’agit de s’approprier, ici donc les forces productives développées jusqu’au stade de la totalité et existant uniquement dans le cadre d’échanges universels. Déjà sous cet angle cette appropriation doit nécessairement présenter un caractère universel correspondant aux forces productives et aux échanges ».
- Dans la mesure où elle est déterminée par son sujet, c’est une appropriation universelle des forces productives, qui la subordonne à tous les individus : mais « les échanges universels modernes ne peuvent être subordonnés aux individus qu’en étant subordonné à tous ».
- Cette appropriation, « conditionnée par la façon particulière dont elle doit s’accomplir », suppose, enfin, un processus universel d’appropriation qui repose nécessairement sur l’union universelle du prolétariat : elle suppose « une union obligatoirement universelle à son tour, de par le caractère du prolétariat lui-même » et une « révolution qui (...) développera le caractère universel du prolétariat ».

(2) Selon Marx, cette appropriation universelle est, en même temps et du même coup, nécessairement intégrale, puisque elle suppose et entraîne le développement total des individus. C’est l’objet même de l’appropriation qui l’implique :

« L’appropriation de ces forces n’est elle-même pas autre chose que le développement des facultés individuelles correspondant aux instruments matériels de production. Par là même, l’appropriation d’une totalité d’instruments de production est déjà le développement d’une totalité de facultés des individus eux-mêmes. »

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L’appropriation d’une totalité de forces productives et le développement d’une totalité de facultés individuelles se conditionnent réciproquement. Seul le développement des facultés rend possible l’appropriation qui rend possible à son tour ce développement. C’est ce second aspect que Marx développe, en faisant sans doute référence au passage précédemment cité, quand il écrit :

« Nous avons montré en outre que la propriété privée ne peut être abolie qu’à la condition que soit réalisé un développement complet des individus ; ceux-ci se trouvent en effet en présence de forces productives et de formes d’échange de caractère multiforme et seuls des individus dont le développement sera complet pourront se les assimiler, c’est à dire en faire l’activité libre de leur existence [5]. »

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(3) Enfin, comme toutes les sphères de l’aliénation sont interdépendantes, l’émancipation ne peut être que complète (puisque elle surmonte la totalité des aliénations humaines). De même que la division du travail engendre une aliénation universelle et intégrale qui requiert une appropriation universelle et intégrale, elle engendre toutes les formes de l’aliénation humaine (de la domination des hommes par les produits de leur propre activité). Dès lors la suppression de la division du travail doit engendrer une émancipation globale, qui doit mettre un terme à la subordination des hommes à la division à la division du travail et dépasser l’antithèse entre travail et plaisir [6].

Elle doit, en particulier, affranchir les hommes de l’existence des institutions politiques. L’existence de l’État résulte de la division du travail qui engendre « la contradiction entre intérêts particuliers et intérêt collectif qui amène l’intérêt collectif à prendre en qualité d’État, une forme indépendante » [7]. La suppression de la division du travail doit donc entraîner celle de l’État :

« De ce que nous avons dit plus haut contre Feuerbach, il ressort que les Révolutions qui ont eu lieu jusqu’à présent, dans le cadre de la division du travail, ont nécessairement conduit à de nouvelles institutions politiques ; il en ressort également que la révolution communiste qui abolit la division du travail aboutit en fin de compte à la disparition des institutions politiques [8]. »

L’appropriation sociale apparaît bien ici comme la condition d’une émancipation totale dans toutes ses dimensions. Et avec une telle perspective, qui se présente comme historiquement fondée, le dépassement des formes partielles et dogmatiques du socialisme et du communisme, qui seront en 1847-1848 présentées comme des formes utopiques du socialisme et du communisme, est donné pour accompli. Mais quelle est en effet cette nécessité qui « contraint » et « oblige » les individus à s’émanciper ou qui « ne peut que » ou « doit nécessairement » prendre les formes envisagées par Marx ? Quelle est cette nécessité qui conjugue ce qui est indispensable si… et ce qui est inéluctable finalement ? Quelle est cette promesse et que promet-elle, si ce n’est le comble de l’utopie ? Celle-là même qui se distingue des prescriptions doctrinaires, mais se confond cependant avec la poursuite de perfections imaginaires ? Ces questions méritent d’être posées, car, présentés ainsi, le contenu du projet (qui se défend d’en être un) ainsi que la nécessité historique (qui, semble-t-il, en garantit par avance la réalisation) menacent en permanence de miner la validité de la perspective communiste. Surtout quand le refus légitime de prescrire les formes et le trajet de l’émancipation sociale neutralise les tentatives d’esquisser ces formes et d’en inscrire la visée dans une stratégie.

Sans doute la dimension critique de cette utopie promise est-elle proprement explosive. Mais Marx, dans la suite de son œuvre ne cessera de se débattre avec le dispositif initial de ce communisme-là et de tenter d’en contenir les embardées, en s’efforçant de fonder sur une analyse du mode production capitaliste la nécessaire possibilité de l’appropriation sociale et d’en mettre à l’épreuve les effets escomptés, les modalités et les formes. Comment ? Quel contenu et quelle forme donner à la perspective de l’appropriation sociale – aux perspectives nécessaires à l’émancipation sociale ?

2. Des perspectives nécessaires

Deux questions méritent donc une courte clarification préalable : quelle émancipation communiste ? Quelle transition au communisme ?

2.1. La question de l’émancipation

La critique de Marx vise, dans le monde capitaliste qu’il voit se renforcer sous ses yeux, une double séparation où s’inscrivent la domination et l’exploitation : la séparation de la société civile et de l’État ; la séparation entre les travailleurs et les moyens de production.

La séparation de la société civile et de l’État est en même temps la séparation entre l’individu concrètement socialisé et le citoyen abstrait. Dans cette séparation sont inscrits les mérites et les limites de l’émancipation politique. Les mérites, car cette séparation met un terme à l’unité de la domination politique et de l’oppression sociale, caractéristique de la relation féodale. Les limites, car l’émancipation politique, y compris dans ses formes les plus démocratiques, sépare l’homme de lui-même. Elle confie le citoyen abstrait à une communauté réelle mais illusoire qui garantit des droits effectifs mais privés de contenu. Et elle abandonne l’individu réel à une société déchirée, où il ne peut réaliser ses potentialités. Autant dire sa liberté. L’émancipation politique n’est donc pas le dernier mot de l’émancipation humaine. La « vraie démocratie » suppose de surmonter la séparation : telle est la première conclusion de Marx.

Précisons un peu. La séparation de la société civile et de l’État s’enracine dans le déchirement de la société civile. Marx pense d’abord se déchirement comme le règne de l’homme égoïste – la guerre de chacun contre tous. On sait que ce déchirement est pour lui, en vérité, dominé par l’existence de classes non seulement distinctes ou inégales, mais antagonistes. Autant dire que cette première séparation s’enracine dans la seconde : la séparation entre les travailleurs et les moyens de production.

La séparation entre les travailleurs et les moyens de production est synonyme d’appropriation privée des moyens de production : privée, c’est-à-dire non pas (ou pas seulement) individuelle, mais privative. Elle est privée, parce les autres en sont exclus. Privée, c’est-à-dire exclusive : non seulement juridiquement mais effectivement exclusive. La propriété ou l’appropriation privée, ce n’est pas une propriété ou une appropriation individuelle, purement juridique ou marchande, mais une propriété ou une appropriation dont les producteurs sont exclus : parce qu’ils n’exercent aucun pouvoir sur la finalité de la production, la répartition des produits, l’organisation de la production. Voilà pourquoi appropriation exclusive et exploitation sont synonymes.

Dans la double séparation entre la société civile et l’État et entre les travailleurs et les moyens de production sont inscrits la domination et l’exploitation que Marx, dans le Manifeste, présente comme un double esclavage. Surmonter ces séparations – les dépasser comme on le dit souvent, les abolir comme on le dit parfois – implique de les résorber autant que possible, faute de pouvoir totalement les supprimer.

Malgré quelques hésitations et ambiguïtés, Marx ne propose pas de réaliser la liberté de tous par la pure et simple absorption du politique par le social. Il pense l’existence d’un pouvoir public, débarrassé de toutes les fonctions oppressives et répressives qui résultent inévitablement de la division de la société en classes. Voilà ce que signifie très exactement le dépérissement de l’État.

Malgré quelques hésitations et ambiguïtés, Marx ne propose pas de réaliser la liberté de tous par la pure et simple réunification entre le travailleur et ses propres moyens de production. Il pense l’existence d’une appropriation collective et non exclusive des moyens de production, placés directement sous le contrôle des producteurs. Voilà ce que signifie très exactement l’abolition de la propriété privée.

Quelles sont, pour Marx, les conditions de cette double émancipation. ? La conquête du pouvoir politique par le prolétariat et l’exercice de sa suprématie politique - de sa dictature - durant toute la période de transition au communisme proprement dit.

2.2. La question de la transition

La transition au communisme se présente d’abord comme transition d’une société dominée par une organisation sociale échappant à la volonté des hommes à une société où les hommes en maîtrisant les conditions de la production, maîtrise leur propre socialisation. Ce passage peut être présenté en des termes variables : d’une version faible qui évoque un contrôle conscient à une version forte qui culmine dans une maîtrise intégrale. Dans tous les cas le ressort de ce contrôle et de cette maîtrise est constitué par la planification. À supposer qu’une telle planification ne comporte pas des traits intrinsèquement illusoires ou désastreux, son contenu est indissociable de ses formes. Cette planification repose sur des conditions juridiques et politiques : l’instauration d’une propriété et d’une délibération publiques.

La transition au communisme se présente ensuite comme transition d’une société fondée sur la séparation entre les producteurs et les moyens de production à une société fondée sur la résorption aussi complète que possible de cette séparation. Ce passage peut être présenté, en termes faibles, comme contrôle du travailleur collectif sur le procès de travail et l’organisation de la production ou, en termes forts, comme réappropriation individuelle des moyens de production. Dans tous les cas, le ressort de ce contrôle collectif et de cette réappropriation individuelle est constitué par une forme de coopération. À supposer que cette coopération ne comporte pas des traits intrinsèquement illusoires ou désastreux, son contenu est indissociable de ses formes. Cette coopération repose sur des conditions juridiques et politiques : l’attribution d’un pouvoir de décision et de gestion exercé par les travailleurs eux-mêmes.

Quoi qu’il en soit, même s’il est envisageable qu’au terme de la transition le pouvoir public puisse n’être qu’un moment particulier de l’association des producteurs, il ne peut exister immédiatement de fusion entre les formes politiques et les formes sociales. Quoi qu’il en soit également, il n’existe pas de convergence spontanée entre la coordination de la production dans son ensemble et la coopération productive dans l’entreprise. La suite de ce texte n’a d’autre ambition que de parcourir les détours et d’examiner les recoins de l’argumentation de Marx et d’Engels sur ce sujet.

II. Figures de l’appropriation sociale

Il me semble que l’on peut soutenir qu’il existe chez Marx et Engels deux présentations différentes des formes de l’appropriation sociale, en partie successives, en partie contemporaines. Ces formes, généralement distinctes, sont parfois données comme convergentes ; mais elles ne sont pas véritablement pensées jusqu’au bout [9].

1. La figure étatique de l’appropriation

La première figure de l’appropriation sociale – la forme sous laquelle peut et doit s’effectuer le processus de l’appropriation sociale – est la figure étatique de l’appropriation. Elle apparaît dans toute sa netteté dans Le Manifeste qui préconise, parmi les mesures immédiates prises par le prolétariat au pouvoir, la centralisation et l’appropriation étatiques : l’appropriation proprement dite se traduisant à la fois par l’intervention despotique dans le droit de propriété et les rapports de production et par la planification. Extrait :

« (…) Le premier pas dans la révolution ouvrière est la constitution du prolétariat en classe dominante, la conquête de la démocratie. Le prolétariat se servira de sa suprématie politique pour arracher peu à peu à la bourgeoisie tout capital, pour centraliser tous les instruments de production entre les mains de l’État, c’est-à-dire du prolétariat organisé en classe dominante, et pour augmenter au plus vite la masse des forces productive. Cela ne pourra se faire, naturellement, au début, que par une intervention despotique dans le droit de propriété et les rapports bourgeois de production, c’est-à-dire par des mesures qui économiquement paraissent insuffisantes, mais qui, au cours du développement, se dépassent elles-mêmes et sont inévitables, comme moyens de bouleverser le mode de production tout entier [10]. »

Parmi les dix mesures que mentionne Le Manifeste, retenons celles-ci qui concernent plus directement notre propos :

« 5. Centralisation du crédit entre les mains de l’État, par une banque nationale, dont le capital appartiendra à l’État et qui jouira d’un monopole exclusif. 6. Multiplication des usines nationales et des instruments de production (…). 8. Travail obligatoire pour tous ; organisation d’armées industrielles, et particulièrement pour l’agriculture [11]. »

La centralisation des moyens de production, la propriété étatique de ces moyens, la planification de leur usage, l’intervention étatique dans le droit de propriété et les rapports de production suffisent alors, aux yeux de Marx et Engels, à ouvrir la transition au communisme. Et cette figure d’une socialisation par étatisation dominée par le prolétariat persistera bien au-delà, notamment dans l’Anti-Dühring, rédigé en 1877-1878. Nous y reviendrons.

Pourtant rien n’autorise à confondre a priori cette étatisation avec un étatisme forcené ou à voir dans cette intervention despotique dans le droit de propriété, la marque d’un quelconque despotisme politique :

 L’appropriation étatique des moyens de production est d’emblée conçue comme une appropriation démocratique, dans la mesure où Marx et Engels affirment alors que la conquête de la démocratie se confond pour le prolétariat avec la conquête de sa propre suprématie politique : l’État démocratique (fondé sur le suffrage universel qui, même exclusivement masculin, est alors une exception en Europe) est à leurs yeux la forme d’État adéquate à l’exercice de cette suprématie.

 L’appropriation étatique des moyens de production est d’emblée conçue comme un moment transitoire de l’appropriation publique : elle est précisément destinée à ouvrir une phase de transition au terme de laquelle l’État de classe ayant dépéri, le pouvoir public cesse d’être un instrument de domination politique. C’est ainsi qu’il faut comprendre, me semble-t-il cette phrase apparemment énigmatique :

« Les différences de classes une fois disparues dans le cours du développement, toute production étant concentrée dans les mains des individus associés, le pouvoir public perd alors son caractère politique. »

Et Marx de conclure :

« À la place de l’ancienne société bourgeoise, avec ses classes et ses antagonismes de classes, surgit une association dans laquelle le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous [12]. »

Il n’en demeure pas moins que les conditions du passage de l’appropriation étatique, fût-elle « prolétarienne », à l’appropriation sociale par les individus associés, censément « communiste », est à peine esquissée. Le Manifeste, en effet, comporte encore de nombreux points aveugles :

 Le premier concerne la forme même de l’État démocratique appelé à étatiser les moyens de production : quelle est la forme politique adéquate à l’appropriation sociale, si cet État de transition ne doit pas reconduire la domination des gouvernés par des gouvernants et la séparation des travailleurs d’avec les moyens de production ?

 Le deuxième concerne la formule même de l’appropriation sociale : que signifie « la « concentration de la production dans les mains des individus associés », si la « concentration » ne doit pas s’opposer à « l’association » ?

 Le troisième point aveugle concerne le mouvement même de dépassement de l’étatisation : comment s’effectue le dépassement de la propriété étatique à l’association de producteurs, dès lors que l’on ne peut se contenter de s’en remettre au secours protecteur de l’histoire et aux bienfaits certifiés de la dialectique, auxquels Marx semble, quand il évoque par exemple des « mesures (…) qui, au cours du développement, se dépassent elles-mêmes » ?

Ces questions, ici adressées au texte de Marx, sont, bien sûr, les questions centrales qui nous sont posées par l’expérience historique : est-il possible d’éviter que le moment de la propriété étatique, loin d’ouvrir la voie à une transition au communisme, serve de base à de nouvelles formes de domination et d’exploitation ? Et si oui, comment ?

Un pas décisif sera franchi quand Marx, en liant la conquête de la domination politique du prolétariat à la destruction de la machine d’État léguée par l’État de classe, soulignera, dans La Guerre Civile en France, que la forme étatique de la socialisation est indissociable de la forme démocratique spécifique de cette État : une forme démocratique débarrassée de la bureaucratie et de la représentation proprement politiques. Telle est la principale leçon de la Commune de Paris.

Mais il ne suffit pas que l’État de transition résorbe la bureaucratie et transgresse les modalités de représentation inscrites dans la séparation entre la société civile et l’État pour que cet État ne reconduise pas la séparation entre les producteurs et les moyens de production et, ce faisant, l’ensemble des rapports de production capitalistes qui s’inscrivent dans cette séparation. Sans doute est-ce la raison pour laquelle Marx, dans La Guerre Civile en France met en avant les coopératives et leur coordination.

On doit alors se tourner vers la seconde forme de l’appropriation sociale : la figure coopérative de l’appropriation.

2. La figure coopérative de l’appropriation

Dans l’œuvre de Marx et Engels, les coopératives de production et de consommation ne font qu’assez tardivement l’objet d’un examen critique spécifique [13]. Pour des raisons indissolublement historiques et théoriques : avant 1850, les expériences coopératives sont balbutiantes et/ ou prises dans des expérimentations plus globales et la critique de Marx se focalise sur les théories et les expériences doctrinaires en général, qu’il disqualifie comme des formes utopiques du socialisme et du communisme.

C’est le cas dans Le Manifeste (1848), où Marx prend pour cible « la réalisation expérimentale » des « utopies sociales », sans référence particulière à l’organisation de la production proprement dite [14]. C’est encore le cas dans Les Luttes de classe en France (1848-1850), rédigé en 1850 [15], et surtout, en 1852, dans Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte. Au moment où les associations de producteurs commencent à se multiplier, Marx présente ainsi l’une des conséquences de la défaite de l’insurrection de juin 1848 :

« Pour une part, il se jette dans des expériences doctrinaires, banques d’échange et associations ouvrières, c’est-à-dire dans un mouvement où il renonce à transformer le vieux monde à l’aide des grands moyens qui lui sont propres, mais cherche, tout au contraire, à réaliser son affranchissement, pour ainsi dire, dans le dos de la société, de façon privée, dans les limites de ses conditions d’existence, et, par conséquent, échoue nécessairement [16]. »

La plupart des critiques formulées alors seront reprises lorsque Marx abordera de front la question des coopératives proprement dites : sans changements des conditions générales, qu’il s’agisse du maintien de domination politique de la bourgeoisie et/ou des rapports marchands, les formes coopératives de production et de consommation sont vouées à l’échec et menacent de détourner le prolétariat de la perspective centrale de la prise du pouvoir.

Pourtant, le rôle des coopératives ouvrières dans le mouvement d’émancipation fait peu à peu l’objet dans l’œuvre de Marx d’une réévaluation pour deux ordres de raisons. Des raisons théoriques, sur lesquelles on reviendra plus loin : les progrès de la critique de l’économie politique dans les écrits préparatoires à la rédaction du Capital. Et des raisons historiques : l’essor du mouvement coopératif après 1850 (ainsi l’adhésion de certaines sociétés coopératives à l’Association Internationale des Travailleurs).

Ainsi, il faut attendre 1864 pour que Marx, dans l’Adresse de l’Association Internationale des travailleurs (A.I.T, Première Internationale), expose de façon synthétique une position précise sur le mouvement coopératif que confirme, deux ans plus tard, l’une des résolutions du Premier Congrès l’A.I.T, consacrée au « travail coopératif » [17]. Mais ces textes politiques et publics confirment, on le verra, les écrits théoriques alors non encore publiés. Que faut-il en retenir ?

Dans l’Adresse, Marx présente le « bill des dix heures » (la réduction de la durée quotidienne du travail), comme une défaite de l’économie politique de la bourgeoisie devant l’économie de la classe ouvrière et enchaîne :

« Mais il y avait en réserve une victoire plus grande encore de l’économie politique du travail sur l’économie politique de capital. Nous voulons parler du mouvement coopératif et surtout des manufactures coopératives, montées, avec bien des efforts et sans aide aucune, par quelques bras audacieux. La valeur de ces expériences sociales ne saurait être surfaite. Par des actions et non par des raisonnements, elles ont prouvé que la production sur une grande échelle, et en accord avec les exigences de la science moderne, peut marcher sans qu’une classe de maîtres emploie une classe de “bras” ; que les moyens de travail pour porter fruit n’ont pas besoin d’être monopolisés pour la domination et l’exploitation du travailleur ; et que le travail salarié, comme l’esclavage, comme le servage, n’est qu’une forme transitoire destinée à disparaître devant les travailleurs associés qui, eux, apporteront à leur tâche des bras biens disposés, un esprit alerte, un cœur réjoui. En Angleterre les graines du système coopératif ont été semées par Robert Owen. Les travailleurs du continent ont tenté des expériences qui donnaient une conclusion pratique à des théories qu’on n’a pas inventées en 1848, mais qu’on a alors préconisées bien haut [18] . »

Dans la résolution sur « le travail coopératif », même évaluation :

« Nous reconnaissons le mouvement coopératif comme une des forces transformatrices de la société présente, fondée sur l’antagonisme de classes. Son grand mérite est de montrer pratiquement que le système actuel de subordination du travail au capital, despotique et paupérisateur, peut être supplanté par le système républicain de l’association des producteurs libres et égaux [19] . »

Présenté comme une victoire de l’économie politique de la classe ouvrière contre l’économie politique de la bourgeoisie, le mouvement coopératif se voit donc reconnaître une portée essentiellement démonstrative (qui en relativise le rôle avant la prise du pouvoir politique) et, en même temps anticipatrice (puisqu’il annonce le « système républicain de l’association des producteurs libres et égaux »).

Cette évaluation ambivalente, dans les textes qu’on vient de citer, est confortée par les réserves qui la suivent.

Ainsi dans l’ Adresse  :

« Il y a une autre chose que ces expérience faites entre 1848 et 1864 ont établie sans doute possible : pour excellente qu’elle soit dans ses principes, et si utile qu’elle apparaisse dans la pratique, la coopération des travailleurs, si elle reste circonscrite dans un cercle étroit, si quelques ouvriers seulement font des efforts au petit bonheur et en leur particulier, alors cette coopération ne sera jamais capable d’arrêter les monopoles qui croissent en progression géométrique ; elle ne sera pas capable de libérer les masses, ni même d’alléger de façon perceptible le fardeau de leur misère. (…). Donc, la grande tâche des classes travailleuses, c’est de conquérir le pouvoir politique [20]. »

Même critique, même conclusion dans la résolution de 1866 :

« Mais le système coopératif retreint aux formes minuscules issues des efforts individuels des esclaves salariés est impuissant à transformer par lui-même la société capitaliste. Pour convertir la production sociale en un large et harmonieux système de travail coopératif, des changements généraux sont indispensables. Ces changements ne seront jamais obtenus sans emploi des forces organisées de la société. Donc, les pouvoir d’État, arraché des mains des capitalistes et des propriétaires fonciers, doit être manié par les producteurs eux-mêmes [21]. »

La perspective de la socialisation coopérative généralisée est renvoyée à la transition ouverte par la conquête du pouvoir politique par le prolétariat : la critique de la forme coopérative comme forme directe de l’appropriation qui s’effectuerait sans changements des conditions générales (qu’il s’agisse du maintien de domination politique de la bourgeoisie et/ou des rapports marchands) est donc maintenue.

Deux conditions préalables à l’appropriation coopérative, étroitement liées, sont donc requises : la conquête du pouvoir politique par le prolétariat et l’étatisation de la propriété.

(1) Première condition préalable : la conquête du pouvoir politique par le prolétariat. Elle seule peut créer les conditions d’une appropriation effective. Tel est le fondement de la polémique conduite par Marx et Engels dans plusieurs directions : contre Proudhon, contre Buchez (et le journal L’ Atelier) et contre Lassalle notamment [22].

L’opposition aux revendications de Lassalle et des lassaliens est constante. Dès 1865, Marx réplique :

« (…) l’aide aux sociétés coopératives de la part du gouvernement royal prussien – et quiconque est au courant des conditions de la Prusse en sait d’avance l’insignifiance – est égale à zéro en tant que mesure économique, cependant qu’elle aggrave le régime de tutelle, corrompt une fraction de la classe ouvrière et émascule le mouvement ouvrier. »

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De là cette leçon :

« (…) l’honneur du parti ouvrier exige qu’il repousse de telles chimères, avant que l’expérience n’en ait démontré l’inanité. La classe ouvrière est révolutionnaire ou elle n’est rien [23]. »

Marx s’oppose ainsi à la revendication de « crédits d’État pour la création de d’association de producteurs » dans laquelle il voit, écrit-il en 1868, une « copie littérale du programme du socialisme catholique français, exposé par Buchez dans L’ Atelier à l’époque de Louis-Philippe [24]. » Ou encore, plus radicalement : une reprise de « la formule que Buchez, chef du socialisme français catholique, avait lancée dès 1843 contre le mouvement ouvrier réel en France » [25]. Et pour donner toute la mesure de cette opposition au mouvement réel, Marx reprend, quant à lui, la critique des recettes doctrinaires qui constitue le fond constant de sa critique des formes utopiques du socialisme et de communisme depuis Misère de la Philosophie et Le Manifeste du Parti communiste.

En 1871, Marx revient une fois encore sur les effets corrupteurs de la « solution » lassalienne [26]. Et, en 1875, dans la « Critique du programme de Gotha », il récapitule l’essentiel de sa critique :

« Il est superflu de faire ici la critique de la recette que Buchez prescrivait sous Louis-Philippe par opposition aux socialistes français et que les ouvriers réactionnaires de l’Atelier reprirent à leur compte. Aussi bien, le plus scandaleux n’est-il pas que l’on ait inscrit au programme cette cure miraculeuse et spécifique, mais que l’on fasse un recul général de la position d’un mouvement de classe à un mouvement de secte [27]. »

Et Marx de poursuivre :

« Les ouvriers veulent instaurer les conditions de la production coopérative à l’échelle de la société et tout d’abord à l’échelle nationale. Ce fait ne signifie qu’une chose : les ouvriers travaillent au bouleversement des conditions de production actuelles. Cela n’a rien à voir avec la création de sociétés coopératives avec l’aide de l’État. Pour ce qui est des sociétés coopératives actuelles, elles n’ont de valeur qu’autant qu’elles sont des créations autonomes des travailleurs et ne sont protégées ni par le gouvernement ni par les bourgeois [28]. »

La leçon est claire : il ne suffit pas de créer des coopératives, voire même de demander à l’État de les soutenir, pour franchir les limites de l’ordre social existant. Livrées à elles-mêmes, les coopératives sont vouées à l’échec. Aidées par l’État, elles ne peuvent pas à attendre de cet accouplement que celui-ci jette les bases d’un dépassement du capitalisme.

(2) Deuxième condition préalable à l’appropriation coopérative : le passage par l’étatisation de la propriété sous domination du prolétariat, indispensable au dépassement de la propriété et de l’appropriation privée.

Les coopératives relèvent d’une forme de propriété, non pas commune mais exclusive, dans la mesure où elles sont conçues ou pratiquées comme des entreprises qui appartiennent exclusivement aux travailleurs associés en coopérative. Marx et Engels ne cesseront de contester que la propriété coopérative puisse être la forme générale de l’appropriation sociale. En effet, la généralisation des coopératives, la transformation de l’association des producteurs en une mosaïque d’entreprises autogérées est une généralisation d’une forme exclusive de propriété ne connaissant entre elles d’autres médiations que celles de l’échange, de la concurrence, bref du marché. Ainsi :

« Transférer la terre à des travailleurs agricoles associés, ce serait livrer toute la société à une classe particulière de producteurs. La nationalisation de la terre (c’est-à-dire la propriété du sol et son affermage aux coopératives) opérera une transformation complète des rapports entre le travail et le capital, et elle éliminera enfin la production capitaliste dans l’industrie, aussi bien que dans l’agriculture. C’est alors que seulement que les différences entre les privilèges de classe disparaîtront, en même temps que la base économique sur laquelle ils reposent, et la société se transformera alors en une association de “producteurs” [29]. »

En revanche, sous la domination du prolétariat et sous réserve de prendre place dans un processus plus large incluant l’appropriation publique, les coopératives (« un large et harmonieux système de travail coopératif ») sont indispensables pour instaurer le « système républicain de l’association des producteurs libres et égaux ».

C’est ce que Marx retiendra, dans La guerre civile en France, comme l’une des leçons majeures de la Commune :

« […] ceux des membres des classes dominantes qui sont assez intelligents pour comprendre l’impossibilité de perpétuer le système actuel, - et ils sont nombreux – sont devenus les apôtres importuns et bruyants de production coopérative. Mais si la production coopérative ne doit pas rester un leurre et un piège ; si elle doit évincer le système capitaliste ; si l’ensemble des associations coopératives doit régler la production nationale selon un plan commun, la prenant ainsi sous sa propre direction et mettant fin à l’anarchie constante et aux convulsions périodiques qui sont le destin inéluctable de la production capitaliste, que serait-ce, messieurs, sinon du communisme du très « possible » communisme [30] ? »

C’est ce qu’Engels - parfois plus « oublieux », comme on le verra - soutiendra encore en 1886 :

« Marx et moi, nous n’avons jamais douté que, pour passer à l’économie pleinement communiste, la gestion coopérative à une grande échelle constituait une étape intermédiaire. Or, il faudra en prévoir l’organisation de sorte que la société – donc tout d’abord l’État – conserve la propriété des moyens de production et que les intérêts particuliers des coopératives ne puissent pas se consolider vis-à-vis de la société dans son ensemble [31]. »

Ainsi, tout semble indiquer alors que Marx et Engels proposent de distinguer deux niveaux de socialisation, revêtant des formes spécifiques, mais rigoureusement articulés entre eux. Ce serait ne tenir aucun compte des ambiguïtés persistantes.

H.M.

Suite et fin : « Marx et l’appropriation sociale (2) : [Ambiguïtés, dérives et esquisses »http://www.henri-maler.fr/Marx-et-l-appropriation-sociale-2-Ambiguites-derives-et-esquisses.html].

Source  : « Les figures de l’appropriation sociale chez Marx » in Marx et l’appropriation sociale, collection « Les cahiers de critique communiste », Éditions Syllepse, décembre 2003, pp. 11-54 – Cet ouvrage comprend également des contributions d’Antoine Artous et Jacques Texier.

Notes

[1Dans la suite de ce texte, je n’évoquerai, pour l’essentiel, que des moyens de production.

[2Karl Marx et Friedrich Engels, L’ Idéologie Allemande (1846), Éditions sociales. Je reprends ici, légèrement modifié, un passage de mon livre Convoiter l’impossible. L’utopie avec Marx, malgré Marx, Albin Michel, 1995, p. 98-110.

[3op.cit., p. 445.

[4Pour cette citation et les suivantes, op.cit., p. 71-72.

[5op.cit., p. 445.

[6op.cit., respectivement p. 31-34 et p. 210-212.

[7op.cit., p. 31.

[8op.cit., p. 381.

[9Je m’inspire (très) librement de l’analyse de Jean Robelin dans Marxisme et socialisation, Philosophie/Méridiens Klincksieck, 1989, (Première partie : Figures de la socialisation).

[10Manifeste du Parti Communiste, éditions bilingue, Éditions Sociales, p. 85-87.

[11ibidem.

[12 Manifeste, op.cit., p. 86-89.

[13À l’exception des critiques très précises formulées dans Misère de La Philosophie (1847) contre les fondements théoriques et les effets pratiques des conceptions de Proudhon.

[14Manifeste du Parti Communiste, op.cit., p. 113.

[15Karl Marx, Les Luttes de classes en France, 1848-1850 (1850), Éditions sociales, 1974, p. 47-48, 107, 146-147.

[16Karl Marx, Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte (1852), Éditions sociales, 1968, p. 24, (souligné par moi). Cet extrait fait écho à un passage des Luttes des classes en France (op.cit., p. 107). Dans le même sens, voir la critique de l’Association Fraternelle des ouvriers : Engels, Contribution à l’histoire de la Ligue des communistes, 1885, dans Karl Marx Friedrich Engels, Le Syndicalisme. I. Théorie, organisation activité, textes traduits et réunis par Roger Dangeville, François Maspéro/Petite collection, 1972, p. 85.

[17Adresse inaugurale de l’Association Internationale des travailleurs, 28 septembre 1864, dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., p.97- Karl Marx, Œuvres. Économie I, La Pléiade, 1965, pp. 453-472. Résolutions du Premier Congrès l’A.I.T (Réuni à Genève en septembre 1866), dans Karl Marx, Œuvres. Économie I, La Pléiade, 1965, p. 1463-1472. Voir la résolution intitulée « Travail coopératif », p. 1469-1470.

[18Adresse, Économie I, Pléiade, pp. 466. Voir également dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., t.1p. 96.

[19« Travail coopératif », dans Économie I, Pléiade, p. 1469. Voir également dans Le Syndicalisme, op.cit., p.98.

[20Économie I, Pléiade, pp. 467. Voir également dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., p. 96-97.

[21Économie I, Pléiade, p. 1469. Voir également dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., p. 98.

[22Philippe Buchez (1796-1865), saint-simonien dissident, fondateur du journal en 1825, inspirateur d’une forme de socialisme chrétien ; Ferdinand Lassalle (1825-1864), président de l’ « Association générale des travailleurs allemands » fondée en mai 1863, partisans d’une forme de socialisme d’Etat.

[23Marx à J.-B. von Schweitzer, 13 février 1865, dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., p. 93-94. Marx souligne « l’honneur » ; je souligne le reste.

[24Marx à Engels, 19 septembre 1868, dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., p. 87-88. C’est Marx qui souligne.

[25Marx à J.-B. von Schweitzer, 13 octobre 1868, dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., p. 89-93. Marx souligne « catholique » ; je souligne le reste.

[26Lettre de Marx à F. Bolte, 23 novembre 1871, dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., p. 99-101.

[27Karl Marx, « Gloses critiques sur le projet de programme du parti ouvrier allemand » (1875), plus connue sous le titre de « Critique du programme de Gotha », dans Marx, Œuvres, Économie I, op.cit., p. 1409-1428, et dans Marx, Engels, Critique des programmes de Gotha et d’Erfurth, Éditions sociales, 1966, p. 15sq.

[28ibidem. Ce qui n’exclut nullement la revendication de « la création de coopératives de production sur les domaines de l’État » qu’Engels préconisera en 1884-1886. Engels à Bebel, 30 décembre 1884, dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., p. 101-103 ; Engels à Bebel, 20-23 janvier 1886, dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., p. 103-105.

[29Marx, « La nationalisation de la terre » (1872) dans Œuvres, Économie I, op.cit., p. 1473-1479 ; voir aussi dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., p.105, note 48.

[30Karl Marx, La guerre civile en France (mai 1871), Éditions sociales, 1972, p. 46.

[31Engels à Bebel, 20-23 janvier 1886, dans Le Syndicalisme, t.1, op.cit., p. 103-105.